lundi 4 janvier 2010

Souvenir des rescapés des avions abattus le 7 janvier 1944 à Vrigny non loin de Nibelle...

A quelques jours de la date anniversaire d'un évènement dans la région...

En ce début d’année 2010, nous devons avoir une petite pensée pour les familles de Nibelle et ses environs, qui ont eu l’audace de récupérer les aviateurs américains survivants, parachutés d’un avion « Libérator B-24 D, rejoignant l’Angleterre après avoir bombardé la ville de Ludwigshafen en Allemagne. Cet avion, mitraillé par trois chasseurs allemands s’est écrasé à l’entrée de Vrigny, lieudit la chopinière. Une stèle a été érigée à l’emplacement de sa chute.

Sur les 10 membres d'équipage de cet avion abattu, 5 seulement ont survécu. Carl Mattson (pilote), William Carroro (navigateur), Francis Kruger (mitrailleur), David Nelson (radio) et Irvin Balsam (mitrailleur) ont été tués.
Keith Sutor (mitrailleur), Manuel Rogoff (bombardier), Shirley Berry (co-pilote) et Russel Paquin (mitrailleur) se sont évadés et recueillis par les familles de Nibelle et ses environs. Robert Rugh (mitrailleur) était fait prisonnier.

Après avoir bombardé la ville de Ludwigshafen avec succès, les bombardiers américains prirent le chemin du retour. Toutefois, à leur passage au dessus de Chateauneuf-sur-Loire, les B-24 du 389ème BG et du 93ème BG furent pris pour cible par des chasseurs allemands du JG2 de type Fw-190. Cette attaque entraîna la chute de cinq B-24 entre Vrigny (Loiret) et Unverre (Eure-et-Loir), sans perte pour les Allemands. Les deux premiers bombardiers furent abattus au-dessus du Loiret (Vrigny et Sully-La-Chapelle) puis trois autres furent abattus en Eure-et-Loir.


Lucette Cochard (aujourd'hui Poirier), en 1944
Crédit photo Archives Famille Cochard

Témoignage de Lucette Cochard (aujourd'hui Poirier), 21 ans en 1944, témoin des événements liés à la chute du Liberator de Vrigny :
"A cette époque là, j'étais fermière avec mon mari, Albert Cochard, à la ferme de Saint-Clair située près de Nibelle. Le 7 janvier 1944 vers 12H30, nous étions tous à table. Il y avait mon mari Albert, un ouvrier agricole nommé Marcel Cunin, et mes enfants en bas âge. Les autres enfants étaient à l'école. Au début du repas, nous avons entendu le bruit d'un moteur d'avion. Nous sommes sortis dans la cour et nous avons vu au loin, en direction de Vrigny, un bombardier en flammes qui tombait en tournoyant, et presque aussitôt plusieurs boules blanches : des parachutistes !

Un des parachutistes qui arrivait vers nous est tombé dans les arbres en bordure du champ situé de l'autre côté de la route, au lieu dit « la Ramonerie ». Aussitôt mon mari Albert et l'ouvrier agricole Marcel ont couru vers l'endroit où s'était posé le parachutiste. Moi, très inquiète d'une possible arrivée des Allemands, je suis rentrée dans la cuisine pour m'occuper des enfants qui étaient à table. Au bout de quelques minutes, je vois arriver Albert et Marcel accompagnés d'un grand aviateur (Shirley Berry, le co-pimote). Il était dans un état pitoyable avec son visage tout brûlé. Nous l'avons allongé sur le lit de l'un de mes enfants et j'ai nettoyé ses plaies avec un produit contre les brûlures dont j'avais toujours un flacon à la maison au cas où mes enfants se brûleraient. Ensuite il est venu manger dans la cuisine. Il nous parlait, mais nous ne le comprenions pas.

Un boucher est arrivé en nous disant qu'il savait que nous cachions un aviateur et cela nous a beaucoup inquiétés sur le moment, mais cet homme est resté par la suite très discret sur cet événement.
Albert et Marcel sont retournés dans le bois où était resté accroché le parachute de l'aviateur, mais à leur grande surprise celui-ci n'était plus là !
Je ne me souviens plus comment Madame Ragobert a été prévenue de la présence de cet aviateur chez nous, mais elle est arrivée dans l'après-midi pour discuter avec l'Américain car elle parlait anglais. Elle nous a traduit que l'homme regrettait beaucoup d'avoir perdu son avion. Ensuite l'aviateur s'est recouché. J'ai fermé la porte de la chambre à clé, car elle donnait directement sur la cour et je craignais que quelqu'un entre dans cette pièce. Lorsque mes enfants sont rentrés de l'école, l'un d'eux m'a dit que ça sentait la cigarette américaine ! Mais je ne l'ai pas laissé entrer dans la chambre.

Le soir, l'aviateur est venu dîner puis il s'est recouché. Dans la nuit, une voiture est arrivée dans la ferme. C'était Pierre Charié qui, accompagné du docteur Rousse, venait chercher notre Américain. L'aviateur Shirley Berry m'a serré dans ses bras en me remerciant chaleureusement de l'avoir sauvé, puis ils sont partis tous les trois. J'étais très inquiète. Je pensais « pourvu qu'ils ne le livrent pas aux Allemands ». Nous l'avions sauvé et nous voulions qu'il s'en sorte. Trois ou quatre jours plus tard, Monsieur Charié, qui avait deviné notre angoisse, est venu à la maison pour nous rassurer sur le sort de cet aviateur". (Témoignage recueilli auprès de Lucette Cochard (aujourd'hui Poirier), le 30 septembre 2003 - Source Les avions de la Clairière.)

Aucun commentaire:

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...