Débat autour de la lecture...
Les scientifiques l'affirment, les évaluations le confirment : pour devenir un bon lecteur, il faut savoir décoder les mots. Des données qui font renaître un débat passionné entre les tenants des différentes méthodes de lecture...
Lecture, où est le problème ? La lecture, et particulièrement son apprentissage, est actuellement l'objet de bien des polémiques. Précisons d'emblée que ces polémiques existent dans de nombreux pays développés, notamment dans l'ensemble des pays anglo-saxons, du Royaume-Uni à l'Australie, et qu'elles ne datent pas d'aujourd'hui. Elles ont pris de l'ampleur, avec la démocratisation des systèmes d'enseignement, et donc l'allongement des scolarités pour tous.
Avec la crise économique et la fin du plein emploi, le concept d'illettrisme, lancé en France par ATD Quart Monde (Organisation internationale de lutte contre la grande pauvreté et l'exclusion sociale), connaît un succès médiatique bien au-delà de sa réalité, si préoccupante soit-elle. Parallèlement, on prend conscience de l'importance des premiers apprentissages dans la réussite scolaire. La préoccupation depuis plusieurs années est focalisée sur l'opposition entre « méthode globale » et « méthode syllabique ».
Que des difficultés viennent du fait que le français est comme une langue seconde pour un certain nombre d’enfants de notre pays, on ne peut le nier. Mais il existe pourtant des méthodes de lecture qui ont fait leurs preuves dans la « francophonie » et qu’on se refuse à utiliser en France.
Toute la série Mamadou et Bineta d'André Davesne (1898-1978), par exemple, couvrant l’ensemble du cycle primaire, a formé plusieurs générations d’Africains et jouit toujours dans toute l’Afrique francophone d’un large crédit auprès des enseignants en raison de son efficacité.
En 3 mois d'apprentissage par cette méthode dite « syllabaire », pour reprendre le sous-titre d’un des manuels, un enfant décode toutes les lettres et la quasi-totalité des syllabes ; en 6 mois, il sait déchiffrer n’importe quel texte ; à la fin de l’année scolaire, il lit couramment.
André Davesne annonçait déjà dans une de ses premières éditions : « Dans une classe comptant 80 élèves âgés de 5 à 7 ans, tous nouvellement recrutés, c’est-à-dire ne connaissant pas une lettre ni un seul mot français, un jeune maître qui a suivi scrupuleusement les indications données dans le présent ouvrage est parvenu à faire lire presque couramment au bout de 6 mois 75 enfants. Ces mêmes enfants pouvaient, à la fin de ces 6 mois, écrire sous la dictée des phrases entières. »
Et une autorité comme Léopold Sédar Senghor confirmait : « Des instituteurs de village me l’ont prouvé, le fameux Mamadou et Bineta fait merveille en brousse ».
On comprend donc qu’en attendant une série Mamadou et Bineta réactualisée, les Français d’origine africaine en quête d’une valeur sûre pour leurs enfants se tournent vers les Mamadou et Bineta d’antan, toujours aussi efficaces, toujours aussi bon marché (6 euros le manuel), constamment réédités par EDICEF (groupe Hachette), et disponibles sur des sites comme amazon.com ou fnac.fr, ou encore chez des libraires comme le Gibert Jeune du boulevard Saint-Denis à Paris.
Passant outre le prisme européen colonisateur, ces parents savent s’attacher aux multiples avantages de cette méthode.
Conçue pour des enfants ne connaissant rien au français, elle convient également aux enfants qui n’entendent pas le français à la maison. Progressive et sans douleur, elle permet l’accompagnement et le suivi de l’enfant par les parents eux-mêmes, quand bien même ils seraient mauvais lecteurs, ce qui ne peut que les valoriser. Enfin, avec des illustrations, des noms et des objets africains, elle permet aux parents originaires de ce continent de faire découvrir leur culture à leurs enfants. Il ne faut pas oublier à ce titre qu'André Davesne a travaillé sur la transcription de contes africains, et que son fameux recueil des Contes de la brousse et de la forêt est toujours disponible dans collection Afrique en poche Junior chez Hachette.
On ne parle ici que de l’Afrique francophone, mais d’autres manuels de lecture pour le primaire, adaptés à d’autres peuples et contrées, comme Madagascar ou encore l’Indochine, ont été réalisés durant l’époque coloniale et sont disponibles dans le fonds en manuels scolaires et livres parascolaires du Musée national de l’Éducation. Aussi comprend-on que des parents se tournent vers des valeurs sûres, mais ne comprend-on pas que l’Éducation nationale ne fasse pas plus et autrement avec ce qui est à portée de main.
Il serait bien plus efficace d’adapter à la France plurielle d’aujourd’hui ces méthodes syllabiques qui ont fait leurs preuves parmi ceux dont le français n’était pas la langue maternelle, que de s’acharner avec ces méthodes semi-globales qui n’apprennent même plus à lire aux Français de souche. Quelle est la bonne méthode à adopter... ? (Source : www.scienceshumaines.com et www.soseducation.com)
Crédit photo Akpehou Djonda
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