vendredi 4 septembre 2009

Y a-t-il une pédagogie jésuite ?

Que faut-il comprendre par "recevoir une éducation jésuite"

Pour répondre à votre question, il importe d’avoir une vue générale du système éducatif des jésuites. Ce système repose sur des principes qui n’ont guère changé depuis les "Exercices spirituels" d’Ignace de Loyola et du "Ratio studiorum" (organisation des études) de 1599 mis en place par le P. Acquaviva.

Les principes pour les éducateurs sont ceux de l’autorité (reposant à la fois sur la crainte et la confiance), de l’adaptation (s’adapter au complexe psychologique de l’enfant), de l’activité (éviter toute passivité de la part des auditeurs). La méthode d’enseignement est caractérisée par le développement harmonieux des facultés de l’élève et l’éveil des tendances actives. L’enfant doit acquérir l’art de s’instruire (éveil de la curiosité, exercices de mémoire), l’art de sentir (lecture, composition personnelle, déclamation), l’art de penser (rhétorique, interrogation), l’art d’approfondir (rôle de la prélection ou lecture et commentaire de texte), l’art d’écrire, de parler..
Pour fonder cette formation, et stimuler l’enfant, l’éducateur doit s’appuyer sur l’esprit d’enthousiasme, l’honneur, l’intérêt, l’émulation. Enfin, l’action collective des maîtres a pour but de créer un esprit favorable à leur développement.

L’esprit d’un collège pour les jésuites, c’est le rayonnement intense de quelques idées et sentiments dans des âmes ouvertes et disponibles : « l’amour chevaleresque du Christ, l’optimisme surnaturel, la virilité du caractère, la charité apostolique » (F. Charmot)
Sur le plan du déroulement des études : avant d'arriver en rhétorique, l'écolier doit passer par quatre classes préparatoires, trois années de grammaire, et une classe d'humanités qui correspond à nos classes de troisième et de seconde. En cinq années, le cycle des études purement littéraires doit être parcouru.

Cette éducation de type humaniste est inspirée au niveau des études par la succession ascendante des classes de grammaire, de culture littéraire, de philosophie et de théologie. Une place considérable est donnée à l’étude des langues anciennes, du grec, mais surtout du latin.
Dans les classes de grammaire, et même d’humanités et de rhétorique, tout est fondé sur une méthode de « prélection » qui est une lecture approfondie et intelligente d’un texte bien choisi. Les auteurs classiques de l’Antiquité sont ainsi lus et commentés. Le professeur fait non seulement comprendre le texte, mais le fait goûter et imiter. La classe d’humanités introduit plus spécialement les poètes, celle de réthorique initie au « discours » et à l’éloquence.

Signe de l’esprit de la compagnie, l’activité de l’élève est stimulée par un enseignement qui n’est magistral que dans la mesure où il éveille l’exercice personnel des facultés. D’où l’importance donnée au travail individuel, aux devoirs et composition. La limitation des cours est faite par les temps libres occupés par l’étude privée. Les heures de classes sont vivantes, entrecoupées de récitation et d’interrogations. A certains jours, le collège se rassemble pour assister à des représentations théâtrales de pièces composées par les maîtres ou les élèves.

La gymnastique, puis le sport font partie intégrante de l’éducation jésuite dans la mesure où ils permettent à l’élève de se défendre et de dominer son corps, et participent au principe d’émulation. Pour secouer l’inertie, on utilise l’appétit des honneurs scolaires, l’émulation individuelle ou la concurrence de deux camps qui partagent la classe. L’étude devient un jeu sérieux, enthousiaste, passionné. En tout cela est visé un idéal, consciemment, celui de l’Honnête homme qui se distingue moins par l’érudition que par l’équilibre mental, la rectitude du jugement, la sûreté du goût, la clarté des idées, la maîtrise de soi, la capacité d’assimilation, mais aussi par la perfection du langage et la facilité des relations avec autrui.

Si le professeur a pour mission la formation de l’esprit, son influence est complétée par celle du surveillant, (appelé autrefois « Régent ») chargé de la discipline, des heures d’étude et de loisir, qui mène une existence plus proche de l’élève, plus ouverte au contact et à la manifestation des caractères. Responsable d’une division, le régent est une des pièces maîtresses de l’organisation du collège. Il est avec les élèves pendant la plus grande partie de leur séjour car, s’il n’y a pas plus de 4 à 5h de cours, même les externes sont présents de 7h30 à 19h. Il assiste au lever des pensionnaires, anime les jeux des récréations, organise promenades et fêtes etc. Dans l’organisation des jeux et des loisirs, il dispose de mille moyens éducatifs, il peut demander des efforts sur soi-même.

Ainsi dans son principe une éducation jésuite est un ensemble de méthodes et de règles destinées à enseigner, éduquer et former un honnête homme. Si dans l’histoire de la Compagnie ces principes sont restés inchangés, ils ont été plus ou moins bien appliqués et mis en valeur. Cette pédagogie souvent forte et exigeante insistait surtout sur l’accompagnement personnel des élèves, sur leur implication et leur expression personnelle. Mais socialement, cette éducation visait surtout les élites sociales (plus qu’intellectuelles), elle s’accompagnait d’une rigueur qui influençait parfois toute la vie de l’élève qui avait été généralement pensionnaire.

On a reproché souvent aux jésuites ce « gouvernement des âmes », qui suivait l’élève adulte dans sa vie privée (mariage, succession), mais aussi professionnelle (implication politique ou sociale). Dans un sens positif, être éduqué chez les jésuites, c’est avoir reçu une formation humaniste, ouverte, et formatrice pour le caractère et la vie sociale.
D’une manière négative, le sceau de l’éducation donnée par « les hommes noirs » n'a tendu pour certains qu’à façonner des êtres dociles, voués à la discipline cléricale ou militaire. (Source : Réponse du Département Fonds ancien - Lire l'article complet ICI et lire aussi CECI)


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